L’Afrique et la saga des présidents à vie

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watarabia
Contrairement au Sénégal, qui semble avoir réussi à gagner la bataille des présidence à vie, dans un nombre croissant de pays africains, le véritable problème ne réside pas tant dans l’âge avancé de leurs dirigeants, mais dans leur capacité à se maintenir en poste à tout prix. Ces présidents, parfois âgés de plusieurs décennies, se montrent habiles à conserver leur fauteuil présidentiel, comme s’il était indestructible, malgré les années qui passent. L’une des phrases les plus percutantes à ce sujet est celle de Youssou Ndour, qui affirmait que « l’homme noir aime trop de pouvoir ». Une réflexion qui, même si elle paraît générale, semble particulièrement juste quand on observe les exemples les plus emblématiques.
 
Le cas d’Alassane Ouattara en est une illustration flagrante. En poste depuis 2011, le président ivoirien n’hésite pas à déclarer qu’il « désire continuer à servir » son pays, tout en restant flou sur sa candidature pour un quatrième mandat en 2025. À 80 ans passés, il jure qu’il est « en pleine santé », ce qui n’a pas manqué de faire réagir ses opposants. Ses détracteurs, quant à eux, rappellent qu’aucun homme ne vit éternellement, et que la longévité d’un dirigeant ne doit pas être confondue avec celle de son mandat.
 
Un autre exemple édifiant est celui de Paul Biya, le président du Cameroun. À bientôt 92 ans, ce dernier exerce une présidence ininterrompue depuis 1982. Une longévité qui force l’admiration ou le désaveu, selon l’angle sous lequel on la considère. Bien que fréquemment vu sur une chaise roulante, la santé chancelante et la canne à la main, Biya assure qu’il est toujours « déterminé à servir », prédisant un huitième…mandat pour 2025. Ses propos semblent parfois relever d’une forme de déni, mais dans ce pays, il est interdit de critiquer l’état de santé de celui qui est perçu comme un « dieu », à la tête d’un système où l’image du président est quasiment sacrée. Ce tabou, bien qu’absurde, incarne la réalité d’une gouvernance où les dynamiques de pouvoir sont souvent figées, à l’abri de toute remise en question.
 
Si la longévité des présidents africains soulève des interrogations légitimes sur leur capacité à répondre aux besoins contemporains de leurs populations, elle met aussi en lumière une forme de culture politique où le pouvoir devient une fin en soi. 
 
L’Afrique, avec ses contradictions, ses talents et ses excès, continue de nous étonner. Mais un questionnement demeure : à quel moment un dirigeant doit-il céder son fauteuil pour laisser place à la jeunesse et à l’innovation qu’il prône pourtant souvent dans ses discours ?
 
La scène politique africaine semble avoir un problème avec la finitude. Mais face à des fauteuils présidentiels aussi « incassables », il devient plus difficile de croire à un renouvellement sain du pouvoir.

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