L’épicentre du séisme, à seulement huit kilomètres de profondeur, a été localisé à 27 kilomètres de Jalalabad, chef-lieu de la province de Nangarhar, à la lisière de la province voisine de Kounar, selon l’US Geological Survey.
C’est dans cette dernière province que le bilan est le plus lourd et c’est vers cette région que se dirigent lundi matin les hélicoptères de secours dépêchés par les autorités talibanes. Depuis leur retour au pouvoir en 2021, elles ont déjà été confrontées à un autre séisme d’ampleur : en 2023, à Hérat, à l’autre extrémité du pays, dans l’ouest frontalier de l’Iran, plus de 1 500 personnes avaient été tuées et plus de 63 000 habitations avaient été détruites.
Plus de 800 morts, selon un bilan provisoire
Cette fois-ci, un bilan encore provisoire fait état de 800 morts et 2 500 blessés dans la seule province de Kounar, ainsi que 12 morts et 255 blessés dans la province voisine de Nangahar, où a été localisé l’épicentre du séisme, à seulement huit kilomètres de profondeur, selon le porte-parole du gouvernement, Zabihullah Mujahid.
Les responsables afghans, qui ne cessent de répéter que les bilans vont évoluer, car les recherches se poursuivent dans ces zones reculées et à la géographie accidentée, affirment que les dégâts sont « très importants » à Kounar.

Certains hélicoptères multiplient les aller-retour pour transporter vers des hôpitaux les blessés sortis des décombres. Sur les réseaux sociaux, des images nous parviennent d’habitants pris au piège sous des montagnes de débris, ou coincés dans la boue. « C’était le séisme le plus puissant que j’ai vécu. Le premier tremblement de terre a eu lieu autour de minuit et était très intense. Jusqu’au lever du soleil, jusqu’au matin, il y avait des secousses toutes les 20 minutes. C’était très intense ici à Jalalabad, mais il n’y a pas eu de maisons détruites. Il y a eu beaucoup plus de victime dans la province de Kounar, et nos amis qui ont de la famille là-bas s’y sont rendus ce matin », témoigne auprès de RFI un habitant de la capitale provinciale.
Le directeur de l’information au croissant rouge afghan, Juman Khan Nael, explique que les équipes de sauvetage essaient d’atteindre les zones les plus reculées, notamment dans la province de Kounar, particulièrement touchée par le séisme. Ces régions, en plus d’être accessibles seulement avec des hélicoptères, ou à pied, sont aussi remplies de logements particulièrement fragiles face aux tremblements de terre, explique le responsable de l’ONG. « Les habitations sont faites avec des cailloux, du bois, de la boue… Ce sont ces matériaux qui ont été utilisés pour construire les maisons. Et 90% des habitations rurales de la province ont été détruites », précise Juman Khan Nael à RFI.
Nos équipes travaillent sur place, mais nous ne pouvons pas communiquer avec elles. J’ai eu un appel avec un de nos représentants qui m’a dit qu’il avait dû marcher durant 4h pour atteindre une zone et qu’il reviendrait vers nous plus tard pour transmettre le nombre des victimes qui s’y trouvaient.
Un pays déjà frappé par des catastrophes naturelles
L’Afghanistan est fréquemment frappé par des tremblements de terre, en particulier dans la chaîne montagneuse de l’Hindou Kouch, près de la jonction des plaques tectoniques eurasienne et indienne. Mais celui survenu au cœur de la nuit – et suivi de cinq répliques, dont l’une de 5,2 – a été particulièrement violent. Des journalistes de l’AFP ont ressenti les secousses à Kaboul pendant plusieurs secondes, ainsi qu’à Islamabad au Pakistan, à 370 km à vol d’oiseau.
« Nous n’avions jamais rien vécu de pareil », a raconté à l’AFP dans la nuit Ijaz Ulhaq Yaad, haut fonctionnaire dans le district de Nourgal, dans la province de Kounar. La plupart des familles sur place, a-t-il poursuivi, venaient tout juste de rentrer en Afghanistan, chassées de leur exil pakistanais ou iranien par les récentes vagues d’expulsions des deux pays voisins qui ont ensemble renvoyé près de quatre millions d’Afghans. « Il y avait environ 2 000 familles de réfugiés qui étaient revenues et comptaient reconstruire leur foyer » dans cette région agricole frontalière du Pakistan, a-t-il expliqué.

Difficile toutefois pour autorités, secours et médias d’accéder aux villages et hameaux, alors que des glissements de terrain ont coupé des routes.
La mission de l’ONU en Afghanistan, l’un des derniers filets de sécurité dans un pays qui a subi de plein fouet les coupes drastiques récentes dans l’aide humanitaire internationale, s’est dite « profondément attristée par un séisme dévastateur qui a fait des centaines de morts ». « Nos équipes sont sur le terrain pour apporter de l’aide d’urgence », ajoute-t-elle. Le patron de l’ONU, Antonio Guterres, a témoigné de sa « solidarité totale avec le peuple afghan ».
Pour François Jouanne, professeur de géophysique à l’université Savoie Mont-Blanc, ce phénomène, bien qu’imprévisible, est logique en raison du raccourcissement entre la plaque indienne et la plaque Eurasie. Des séismes d’une bien plus grande magnitude pourraient toucher la zone himalayenne dans les prochaines années, d’où l’importance de se préparer.
Le séisme en tant que tel, on n’y peut rien. Il est logique, mais pas prévisible. Mais par contre, on peut limiter son impact. Il y a des pays himalayens, par exemple à Katmandou, il y a un scénario sismique, mais je ne pense pas qu’il y ait de scénario en tant que tel en Afghanistan, compte tenu de l’état de développement du pays.
La province de Nangarhar avait déjà été frappée la semaine passée par des crues subites qui avaient tué cinq personnes et provoqué des dégâts, détruisant des terres agricoles comme des zones résidentielles. En octobre 2023, le séisme de magnitude 6,3 à Hérat, suivi de huit répliques, avait été le tremblement de terre le plus meurtrier à avoir frappé ce pays, l’un des plus pauvres au monde, en plus de vingt-cinq ans. D’après la Banque mondiale, près de la moitié de la population afghane vit dans la pauvreté.