Pape Alioune Badara Fall, un pur produit de la société sénégalaise

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Les Sénégalais se sont réveillés, ce mardi, abasourdis par les manchettes des journaux qui mettaient en avant le fait que le vrai meurtrier de Bineta Camara vient d’être arrêté. Et qu’il faisait partie de l’entourage de la victime.

Pape Alioune Badara Fall a été justement appréhendé dans la maison mortuaire durant les cérémonies funèbres. Et ce qui a choqué le plus, c’est le cynisme avec lequel il agissait. Il donnait régulièrement des informations sur les funérailles, priait pour la défunte et s’activait à accueillir les invités. En somme, il agissait en vrai bon voisin.

Personne n’a compris son jeu. Sauf les enquêteurs de la Police qui, chevronnés, ne se laissent pas amadouer par le comportement en général hypocrite de coupables prêts à tout faire pour ne pas attirer l’attention.

Ils ont pu comprendre que le vigile, c’était une fausse piste et qu’il fallait davantage creuser pour trouver le vrai coupable. Ce dernier aurait avoué, ce qui nous donne le courage de le traiter en meurtrier, malgré la présomption d’innocence dont il bénéficie encore.

Mais ce qui est frappant dans cette affaire, c’est le comportement du suspect qui sera bientôt l’accusé. Pape Alioune Badara Fall est décrit comme quelqu’un de calme, qui aime son travail, de dévoué à sa famille et à son parti, l’Apr où il milite. En somme, c’est un Sénégal ‘normal’’, à la limite exemplaire car son casier judiciaire semble être vierge et on ne lui connait pas d’antécédent de violence ou de prédateur sexuel.

Néanmoins, le masque est tombé. Derrière ce ‘’Sénégal-modèle’’ se cache un criminel sexuel de la pure espèce, parce que prêt à tuer pour effacer les preuves et couvrir ses arrières.

Et après son forfait, il a continué à se comporter le plus normalement du monde alors qu’il savait qu’un innocent était arrêté.

Un pur produit de notre société. Nous vivons dans une société où l’hypocrisie est érigée en règle de vie. Le sourire dégainé à tout bout de champ cache mal, parfois, des intentions malsaines, une envie de faire mal, la médisance, la guerre mystique et les moqueries.

Fall a exactement fait comme la plupart d’entre nous. Il a prié pour Bineta lors qu’il n’est pas sincère. Il a appris à dissimuler ses vraies intentions, à faire semblant pour être bien vue. Bineta lui a fait confiance et l’a payé cher.

Aussi, nous ne devons pas nous étonner que dans cette société où on fait semblant, les crimes se multiplient, les charlatans soient très sollicités  et que les ménages durent le temps d’une rose.

Le mal-sénégalais, c’est l’hypocrisie. Chacun s’empresse de se conformer aux normes de la société avec un excès de zèle certain qui peut tromper plus d’un. Au finish, la déception est grande pour ceux qui, comme Bineta, font confiance à ce type de prédateurs.

La preuve, l’escroquerie est en train de tuer notre tissu social, économique avec l’impossibilité de faire confiance à quelqu’un.

Ces beaux parleurs qui vous inondent de versets de Coran et de Hadith et qui sont les premiers à la mosquée, n’hésitent pas une seconde à profiter de vous si jamais vous commettez l’erreur de leur faire confiance.

Conséquence, c’est la guerre latente dans les lieux de travail, au sein des ménages, dans les familles, en somme à tous les niveaux de notre société. Avec en toile de fond des pratiques mystiques généralisées.

Comme quoi, nous avons un problème d’éducation, de rapport à autrui, de sociabilité. L’autre ne peut pas être perçu comme une simple cible à exploiter à son profit à la première faille, lorsqu’il baisse la garde.

Ces cas sont légion. A Pikine, on se rappelle du meurtre de la Conseillère économique et sociale,Aminata Mactar Ndiaye, par son chauffeur qui lui devait tout.

Des pères de famille sont tués par leurs propres enfants et l’un même a été égorgé par son fils.

Et nous poussons l’hypocrisie jusqu’à s’émouvoir fortement, comme c’est le cas actuellement, et à oublier rapidement le lendemain.

Nous avons une société bizarre qui sécrète une forme de criminalité la plus insidieuse :Le fait de regarder l’autre comme une proie tout en lui montrant le contraire.

Et là-dessus, les forces de l’ordre ont du pain sur la planche.

Assane Samb

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