L’ancien président congolais Joseph Kabila a effectué sa première apparition publique jeudi à Goma, capitale provinciale du Nord-Kivu, un mois après son arrivée discrète dans cette ville stratégique de l’Est de la République démocratique du Congo.
Sa présence dans cette zone en proie à l’insécurité attise les spéculations sur son rôle dans la crise actuelle.
À Goma, les combats entre l’armée congolaise et les rebelles du M23 se poursuivent malgré les appels à la trêve. Soutenus par le Rwanda selon Kinshasa, ces groupes armés ont récemment pris le contrôle de plusieurs localités. C’est dans ce contexte tendu que Kabila a rencontré des chefs religieux congolais. Aucune déclaration n’a été faite à la presse, mais les attentes exprimées lors de cette réunion sont claires.
« En tant que leaders religieux, nous lui avons dit de jouer le rôle d’arbitre pour que la paix revienne parce que pendant 18 ans, il a construit tant de choses que nous ne pouvons pas ignorer. Il a tout fait pour réunifier ce pays. Ce que nous demandons, en tant que chefs religieux, c’est le retour de la paix et rien que la paix. » a déclaré l’évêque Joël Amurani à l’issue de la rencontre.
L’apparition de Kabila à Goma divise. Pour certains habitants, son expérience est précieuse ; pour d’autres, son passé l’empêche d’être l’homme de la situation.
« Je ne pense pas que Kabila puisse mettre fin à la guerre parce qu’il a été président de ce pays il y a longtemps, mais il n’a pas réussi. Je ne pense pas qu’aujourd’hui, alors que la situation s’aggrave, il vienne y mettre fin », estime Alexis Bauma, habitant de Goma.
Mais d’autres restent convaincus que l’ancien chef de l’État garde une influence importante.
« Pour que nous ayons la paix, nous devons passer par lui parce qu’il a une très bonne compréhension des problèmes auxquels les Congolais sont confrontés », souligne Amani Safari, vendeur de gaz local.
Joseph Kabila, qui a dirigé la RDC de 2001 à 2019, fait aujourd’hui l’objet de fortes accusations de la part du gouvernement actuel. Le président Félix Tshisekedi l’accuse de soutenir une insurrection à l’Est, notamment en lien avec le M23. Le Sénat a récemment levé son immunité parlementaire, ouvrant la voie à d’éventuelles poursuites judiciaires pour trahison et crimes de guerre.
Si certains voient en son retour un simple calcul politique, d’autres y perçoivent l’ultime carte d’une réconciliation possible. Mais à Goma, ville meurtrie par la guerre, c’est surtout la paix que réclame une population à bout.