Rien ne va plus sur les bords de la Mersey. Après la claque reçue hier à l’Etihad Stadium (3-0), Liverpool apparaît méconnaissable. Dominés de la tête et des épaules par Manchester City, les Reds ont offert une prestation d’une inquiétante passivité, bien loin de l’intensité qui faisait leur marque de fabrique. Arne Slot, impuissant sur le banc, a reconnu sans détour la supériorité de l’adversaire : « ils ont été meilleurs que nous. Nous avons eu beaucoup de mal à ressortir le ballon depuis l’arrière et il nous a été difficile de le conserver. Nous avons souffert face à Doku dans l’axe et O’Reilly sur les côtés. » Le technicien néerlandais n’a pu que constater les dégâts : une équipe incapable de ressortir proprement, submergée par le pressing adverse, et dont les individualités ont sombré collectivement. Dans un match à sens unique, les tenants du titre ont semblé fatigués, désorganisés et surtout sans idée. Même l’énergie coutumière d’Anfield semble s’être éteinte sur la pelouse de l’Etihad.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Il s’agit déjà de la cinquième défaite en onze rencontres de Premier League, soit davantage que sur l’ensemble de la saison passée. Le constat est sans appel et Slot ne se voile pas la face : « j’ai le sentiment qu’il y en a trop, et la dernière chose à laquelle je devrais penser maintenant, c’est la course au titre. Nous devrions d’abord nous concentrer sur le fait d’obtenir des résultats, match après match, avant même d’y songer. » Liverpool glisse dangereusement au classement, désormais huitième, à huit longueurs du leader Arsenal. La désillusion est d’autant plus brutale que les Reds restaient sur deux victoires convaincantes face à Aston Villa et au Real Madrid, laissant espérer un renouveau. Mais cette démonstration mancunienne a brutalement ramené les hommes de Slot à la réalité, à savoir celle d’un champion déchu, fragilisé mentalement et incapable de répondre au défi imposé par une équipe de City chirurgicale dans tous les compartiments du jeu.
Les Reds n’y arrivent plus
Même les rares éclaircies de la rencontre n’ont tourné qu’à la frustration. Le but de Virgil van Dijk, refusé pour un hors-jeu d’Andy Robertson, a été un tournant symbolique d’une équipe à la dérive. Slot s’en est ému sans pour autant s’y réfugier : « au moment où vous marquez, vous regardez le juge de ligne. Je n’ai pas bien vu l’action. Nous avons commencé à célébrer, puis j’ai vu qu’il avait fallu quatorze secondes avant que le drapeau ne soit levé. Pour moi, une mauvaise décision a été prise sur le terrain et elle a été confirmée à la vidéo. Cela ne veut pas dire que cela aurait changé le résultat, car City a été bien meilleur. » L’entraîneur néerlandais a beau évoquer une erreur d’arbitrage, il admet que même un score de 1-1 n’aurait sans doute rien changé tant la différence de niveau était criante. « Parfois, rentrer aux vestiaires à 1-1 peut donner une autre dynamique à la seconde période. Nous avons corrigé certains problèmes après la pause. Puis un but incroyable de Doku nous a mis à 3-0, mais j’ai quand même vu une équipe qui voulait revenir dans le match. » Des mots lucides, mais qui sonnent creux après une telle démonstration d’impuissance collective.
Ce revers prend des allures de signal d’alarme. Dans une Premier League toujours plus impitoyable, Liverpool semble désormais distancé, tant sur le plan technique que mental. L’ombre de Guardiola plane encore sur un club qui, après avoir longtemps incarné la résistance face à City, donne aujourd’hui l’impression de jouer dans une autre catégorie. Tandis que les écrans géants célébraient le 1000e match du technicien catalan, les supporters des Reds, relégués au rang de figurants, tentaient d’oublier leur impuissance en chantant dans le vide. « La réalité, c’est que nous sommes huitièmes actuellement… La course au titre devrait être notre dernière préoccupation », a résumé Slot, lucide mais résigné. Plus que la défaite, c’est la manière qui interroge avec un manque d’agressivité, des erreurs de relance, des absences défensives et des joueurs majeurs transparents. Si rien ne change, Liverpool risque de vivre une saison longue et douloureuse, et de devenir, plus que jamais, la risée de toute l’Angleterre.

