Côte d’Ivoire: l’opposant Tidjane Thiam radié de la liste électorale par la justice

En Côte d’Ivoire, le tribunal de première instance d’Abidjan a ordonné ce mardi 22 avril la radiation de Tidjane Thiam de la liste électorale. La juge estime qu’il n’était plus Ivoirien au moment de son inscription sur la liste en 2022.
La juge a estimé que Tidjane Thiam a perdu la nationalité ivoirienne quand il a acquis la nationalité française. Elle s’appuie sur l’article 48 du Code la nationalité qui stipule qu’un Ivoirien majeur perd la nationalité ivoirienne au bout de 15 ans s’il acquiert volontairement une autre nationalité.
Les avocats de Tidjane Thiam ont tenté de prouver que leur client est né Français et que donc, cette disposition du Code de la nationalité, ne s’applique pas à leur client puisqu’il serait né binational. Ils affirment avoir présenté des documents administratifs allant dans ce sens. « Nous respectons la décision de la juge, mais nous ne la partageons pas », affirme Me Rodrigue Dadjé, l’avocat de Tidjane Thiam, déçu par cette décision de justice.
À l’origine, tout est parti d’un électeur, qui, au moment du contentieux sur les listes électorales, a saisi la Commission électorale indépendante (CEI) pour demander la radiation de Tidjane Thiam de la liste, estimant qu’il n’était plus Ivoirien. La CEI a débouté ce requérant qui s’est donc tourné vers le tribunal de première instance. Une audience s’est tenue à huis clos ce matin. Audience au cours de laquelle chaque partie a présenté ses arguments.
Tidjane Thiam dénonce « un déni de justice »
N’étant pas électeur, Tidjane Thiam n’est, à ce stade, pas éligible à la présidentielle du 25 octobre. Il faut aussi préciser qu’à ce stade, il n’y a pas d’autre recours possible pour demander sa réinscription sur la liste électorale. « Je n’accepte pas cette radiation : elle est injuste, injustifiée et incompréhensible », souligne Tidjane Thiam, dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux. Tidjane Thiam dénonce « un déni de justice » et appelle à des pourparlers pour sortir de cette situation : « Nous demandons instamment à toutes les parties de s’engager dans un dialogue constructif afin que le scrutin d’octobre soit conforme aux normes internationales et que personne ne soit exclu du processus électoral », lit-on dans un communiqué diffusé ce soir.
Dans une déclaration sur les réseaux sociaux, Tidjane Thiam estime que « le pouvoir vient d’éliminer à travers un raisonnement juridique inique et incompréhensible son rival le plus sérieux […] Ce n’est pas normal et ce n’est pas l’image que je souhaite que notre pays donne de lui-même. »
Il ajoute que « Le PDCI est uni derrière moi. Il n’y aura pas de plan B, pas de plan C. Nous voulons aller à cette élection, représentés par le candidat que le PDCI s’est librement choisi à 99,5 % et de façon complètement transparente et démocratique. » « Soyez assurés que je serai déterminé à être candidat à la présidence de la République », dit-il en conclusion de sa déclaration.
Mais pour l’instant, Tidjane Thiam doit à nouveau défendre son dossier ce jeudi, devant le tribunal de première instance d’Abidjan.
Une décision qui fait réagir la classe politique
NewsletterRecevez toute l’actualité internationale directement dans votre boite mail
L’URD, le parti dirigé par Danièle Boni Claveri, dénonce cette décision. « L’élection semble s’inscrire dans une logique d’exclusion systématique des figures majeures de l’opposition », affirme ce parti d’opposition. « Le cas Thiam n’est pas isolé », relève l’URD dans un communiqué : « Laurent Gbagbo, Guillaume Soro, Charles Blé Goudé ont tous été écartés par des décisions judiciaires ou administratives ».
De son côté, le PPA-CI, formation de Laurent Gbagbo, n’a pas encore pris de position officielle. Une réunion du Comité central est prévue samedi 26 avril, et devrait permettre au parti de se prononcer. À noter que l’ancien président, actuellement inéligible, a, lui aussi, exprimé, il y a une dizaine de jours à Dabou, sa volonté de participer au scrutin d’octobre, déclarant qu’il « ferait tout » pour y parvenir.
Au RHDP, on rejette toutes les accusations portées par l’opposition : « le droit a été dit », affirme Kobénan Kouassi Adjoumani, le porte-parole du RHDP. « Le pouvoir judiciaire est séparé du pouvoir exécutif, la justice est impartiale », poursuit ce responsable qui rejette l’idée d’un « dialogue constructif », proposée par Tidjane Thiam.
Le juge doit maintenant notifier la CEI de son arrêt. La liste électorale définitive sera publiée le 20 juin.