Algérie : les manifestants et l’armée s’affrontent dans une révolution stagnante
Un pays qui n’a pas pu se débarrasser de son dirigeant pendant 20 ans semble incapable d’en choisir un nouveau. À ce jour, beaucoup d’Algériens pensaient avoir un nouveau président.
Après des mois de manifestations qui ont provoqué la chute du président Abdelaziz Bouteflika en avril, des élections ont été fixées au mois de juillet. Cette échéance allait et venait, cependant, sans remplacement en vue. Les manifestants, fâchés à la fois par la politique bloquée et une économie en perte de vitesse, descendent toujours dans les rues chaque semaine.
L’armée, qui détient le pouvoir de facto, les tolère. Mais rien d’autre n’a changé: le statu quo a prévalu pendant un été long et languissant. Même si quelques gestes forts ont été accomplis par les nouvelles autorités par intérim, avec la bénédiction de Gaid Salah, le chef de l’armée, il n’en demeure pas moins qu’une infime partie de ce que veut le peuple.
Après avoir donné un dernier coup de pouce à M. Bouteflika, l’armée a entrepris de démanteler la base du pouvoir qu’il avait construite au cours des deux décennies précédentes. Des hommes d’affaires fortunés, comme Ali Haddad, qui s’est enrichi grâce aux contrats de l’État, ont été emmenés en prison. Il en était de même du frère du président, de deux anciens chefs d’espionnage et d’autres personnalités puissantes des coulisses connues sous le nom de pouvoir. Cela n’a toutefois pas été suffisant pour convaincre les révolutionnaires à retourner chez eux et à libérer les rues. Les manifestants veulent que tout l’appareil dirigeant, soit mis hors course et qu’il y ait un gouvernement de transition qui prendra le temps de refondre tout le système et d’en mettre un nouveau sur les rails avant une élection en bonne et due forme. Mais les militaires disent non.
Gaid Salah, l’actuel homme fort de l’Algérie ne veut pas entendre parler de transition. Pour lui, une période de transition ne ferait qu’aggraver la situation du pays. Il préconise que la constitution actuelle du pays soit respectée. Sauf que cette constitution a été taillée sur mesure au fil des années par le système Bouteflika. Une commission de dialogue a été mise en place pour tenter de faire la médiation entre les dirigeants intérimaires, les manifestants et les partis politiques afin de trouver un terrain d’entente pour aller de l’avant. Mais cette commission peine à évoluer car les manifestants ont posés des préalables que Gaid Salah rejette. En somme ; cette révolution algérienne n’a eu pour seul effet pour le moment, que de faire partir Bouteflika qui d’ailleurs ne dirigeait pratiquement plus rien. On comprend désormais qu’en réalité, celui qui dirigeait l’Algérie depuis toutes années de maladie de Bouteflika, c’était en fait, le Général Gaid Salah, chef de l’armée.