Trafic routier : Dakar, dans une ère d’engrenages …

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Circulation routière à Dakar, Sénégal. Mai 2017 Dakar est le centre névralgique du Sénégal. Avec moins de 0,3 % du territoire national, la région de Dakar abrite plus de 66 % de l’activité économique du pays et près de 25 % de la population sénégalaise. Selon les dernières estimations la population dakaroise est estimée à plus de trois millions d'habitants.

koumpeu.com–C’est comme dans un puzzle auquel il faut apporter, sur un seul coup, la pièce de sortie. A Dakar, le trafic routier est devenu, ces dernières années, un réel casse-tête autant pour les collectivités locales des quatre coins de la ville que pour les usagers. Des chantiers fourmillant, impliquant de nouvelles infrastructures, au nombre important de voitures en tout genre, ça change de capitale. Autour de ce grappin, une industrie se développe : désormais, il est nécessaire d’assurer au quotidien la sécurité et la commodité des usagers de la route. Un rôle important que d’aucuns tiennent à cœur…pour allier l’utile à l’agréable. Et comme si la délocalisation de l’aéroport à Diass ne semble pas apporter la solution de l’heure, de plus en plus de perspectives s’annoncent dans le sillage.

Les bouchons et embouteillages font une histoire dans la capitale sénégalaise. Une vielle guerre de roues sur les principales artères entre la Patte d’Oie, Castors, l’Autoroute, la Vdn (Voie de Dégagement Nord), entre autres points chauds. Et Dakar s’ouvre dans un sacré tumulte, pour se refermer sur un joug compact auquel les automobilistes se sont habitués, accueillant ensuite de petites conformités aux heures de pointe.

Des trajets d’une à deux heures pour rallier le centre-ville aux quartiers périphériques et la banlieue. Pour dire que les renforts de policiers, dispersés un peu partout dans la ville, ont longtemps servi ailleurs que pour le trafic urbain. Jusqu’à une époque très récente, à certains endroits, les files de voitures n’ont souvent dû leur salut qu’à la perspicacité de volontaires de la circulation. «Des gens ont tantôt improvisé des substituts à la police de la circulation pour apporter un coup de main. Le plus souvent, on s’y frotte par nécessité», fait remarquer Kader, un automobiliste sur l’axe Castors Pikine via Yarakh et Maristes 1, non sans préciser que les embouteillages peuvent être les conséquences directes du non-respect du code de la route.

Pour Babacar Senghor d’Agéroute, sans nul doute, la question mérite d’être posée comme telle au moment où, informe-t-il, l’Etat investit 6 milliards, chaque année, pour l’entretien des routes. Pourtant, les usagers se plaignent du mauvais état des tronçons prisés dans la capitale qui, par ailleurs, connait un véritable chamboulement avec les «améliorations» constatées.

Les routes de l’avenir ?

«Depuis quelques années, nous avons fait beaucoup de travaux routiers. Nous avons élargi les routes qui étaient à une voie, nous en avons fait 2X2 voies. Nous sommes en train de construire des voies de dégagement. Il y a eu beaucoup d’efforts en matière d’infrastructures routières», avance-t-on à l’Agéroute dont le directeur régional à Dakar soutient le fait qu’ «avoir de très bonnes routes incite les gens à avoir des véhicules». En effet, il faut noter que le parc automobile de Dakar a connu une croissance importante ces dernières années. Au point que le gouvernement du Sénégal a pensé pouvoir équilibrer la donne en cessant l’octroi des licences de taxi.

Une décision, pour le moins, indécente selon certains automobilistes qui dénoncent une mafia dans l’octroi de ces permis. «Ce n’est pas juste. Nous avons tellement contribué à desservir la capitale qu’en ce moment, il faut encore penser nous associer en permanence aux stratégies pour faire face à toutes ces exigences», explique un automobiliste qui, ayant une longue expérience des pistes, voyait déjà la capitale dans une telle agitation. Entre temps, le scénario s’est carrément posé avec les nombreux «projets d’infrastructures».

Que de chantiers à Dakar ! A Colobane, comme sur la Vdn, les pans sont là. Dans ce dernier repère, nombre de désagréments sont comptés, d’un bout à l’autre, sur une bonne distance. De loin, on ne voit que le sable rouge et cela, depuis des mois. Point d’accès à pieds. Les ponts de gravas et de sable devront encore s’imposer aux riverains de la zone de Nord Foire jusqu’en fin 2018. Pour accéder dans ces zones, les bus, les voitures comme les taxis sont obligés de faire des détours. Et on retourne ainsi à la case de départs avec de longues heures de route. «A moins de prendre un taxi et même avec ces véhicules d’un confort relatif, la partie est loin d’être gagnée si l’on sait que les tarifs ont grimpé», explique un usager qui dit ne pas reconnaitre la capitale mise, selon elle, «sens dessus, sens dessous».

Concernant ces travaux de rénovation, certains usagers ont d’abord pensé qu’ils se limitent sur les grands axes de la capitale. La banlieue non plus n’a pas échappé à une volonté de modernisation des routes du pays, avec un coup de neuf sur un projet de piste de prolongement de la Vdn allant du Golf Club de Guédiawaye à Tivaoune Peulh. En ce lieu, les bouchons sont visibles. Comme par magie, tous les parcours mènent à la banlieue, entre Guédiawaye, Keur Massar, Tivaoune Peulh et environs. «Il faut que l’Etat voit un peu les priorités. Au-delà de l’autoroute à péage qui est une bonne chose et qui desservit directement le centre-ville en destination de Diamaguène et environs, il faut penser justement trouver des voies rapides et moins dangereuses pour desservir les zones péri-urbains de Dakar car les gens quittent de plus en plus le centre-ville pour installer commerces et affaires aux quatre coins de la ville.

C’est déjà bien avec le prolongement de la Vdn, seulement on n’a pas besoin de mettre des chantiers simultanés un peu partout dans ces zones. Les choses peuvent aller mieux si on trouvait une alternative à toutes ces constructions occurrentes», explique un spécialiste des Travaux Publics qui soutient, par ailleurs, qu’il était nécessaire de construire ces routes si l’on se réfère à la configuration de la région de Dakar…Même si, finalement, le pari est encore loin d’être gagné. «On commence à avoir beaucoup de voies, du coup, mais c’est dommage que les routes soient toujours aussi étroites !», constate un magnat des TP. Pour dire aussi que les usagers devront encore prendre leur mal en patience. «On ne se débarrassera pas facilement de ce désordre à Dakar malgré les efforts faits par l’Etat du Sénégal…».

Dans le sillage, entre mille plans, les moyens de transport à Dakar changent de visage. Les scooters et autres motos apparaissent augustes. Ils sont prisés et deviennent des transports de luxe plus que les 4 X 4 qui trainent, finalement, pour de longues minutes dans les embouteillages. «Ces engins sont tellement nombreux dans ce pays que la police nationale a décidé, un moment, de prendre des mesures adéquates», rapporte Abdou, un ex agent de régulation de la circulation.

Méthodes rentières

Quid des transports en commun que l’Etat a, tout aussi, essayé de réguler. Ces machines qui ont toujours fait le bonheur de certains usagers. D’aucuns les préfèrent de plus en plus. Ils deviennent, tantôt, un recours même pour ceux qui sont véhiculés. Ces derniers ne demandent pas mieux que de pouvoir se déplacer dans la capitale en temps voulu. Après tout, c’est l’objectif principal. Pour cela, l’expertise s’invite. Avec l’aide de «spécialistes du trafic routier» puis des systèmes GPS, le compte à rebours débute. Une véritable machine de guerre qui nécessite de donner des repères et informations en temps réel sur le trafic à Dakar.

Une radio de la place a débuté «l’affaire» pour se targuer d’un succès auprès de tous et gagner en audimat. Des policiers aux usagers de la route, le besoin de collaborer se fait ensuite sentir. «Les policiers comme les usagers me sollicitent, qui pour avoir les points chauds, qui pour avoir une idée de ce qui les attend sur la route», explique ce jeune homme, agent de la radio, qui, chaque matin, quitte son repère pour rallier les différents coins de la capitale et ainsi contribuer à «désengorger» Dakar. Plus tard, des applications pour «aider les automobilistes à anticiper les blocages», entendez les embouteillages qui ont fini par atteindre les moindres recoins de Dakar, voient le jour. Si l’on sait que les automobilistes, à l’instar des travailleurs, regagnant le soir leur demeure, cherchent des raccourcis…pour finir par se retrouver tous dans le même trou !

Le plus souvent coincés dans quelque file à Cambérène, Patte d’Oie ou Maristes…
Mamoudou Elimane Kane, le directeur général de EmC2 Group, lance le pari d’en finir avec les embouteillages. En août 2017, il met en place Trafic Dakar, disponible en téléchargement sur Play Store. Pour lui comme pour d’autres, le genre d’outil vient à point nommé. A l’heure du numérique, l’image explicative avec des signaux et des légendes permet plus facilement d’accéder au trafic routier «En temps réel !», précise-t-il. Une intervention non négligeable selon quelques usagers. Mais combien de Sénégalais osent le pari des smartphones ? Pour le journaliste Ibrahima Lissa Faye, l’enjeu est ailleurs. A ce stade, il faut permettre jusqu’au chauffeur de «car rapide» de pouvoir s’informer sur le trafic routier qui l’interpelle plus que quiconque. Aussi, tallybi.sn, une autre application mise en place par l’éditeur de presse, se voit en plein dans le challenge. «Au lieu seulement de Smartphones, avec le concours de l’Artp, tous les types de téléphones portables vont dans un délai court, pouvoir bénéficier de nos applications.

De sorte que les chauffeurs de cars communément appelés Car rapide, Ndiaga Ndiaye, les bus et autres moyens de transports en commun) vont les consulter», a annoncé Lissa Faye. Il faut dire que l’objectif reste le même : presque tous les acteurs du secteur comme les usagers sont unanimes sur la nécessité de trouver des alternatives, hors circuit, pour anticiper sur les bouchons…et ainsi ne pas tordre davantage l’économie du pays. «Avec les applications GPS qui donnent avec exactitude les latitudes et longitudes des lieux, les embouteillages, les accidents, les travaux, les manifestations et autres incidents de la route, sont signalés à l’avance. Et les automobilistes peuvent les éviter sans trop de difficultés», explique Faye. Comme quoi, il est désormais possible de «maîtriser la circulation avant tout déplacement» !

Diass, le vrai faux prétexte

Malgré la délocalisation de l’aéroport à Diass qui constitue, par ailleurs, un événement majeur dans la solution de décongestionnement de Dakar, la capitale est toujours en manque de bornes, selon les spécialistes. «De toutes les façons, il fallait réagir d’une façon ou d’une autre. Il faut encore que ça change. Le transfert de l’aéroport de Yoff à Diass est un pas mais c’est un faux prétexte si l’on sait que c’est encore plus difficile de gérer cet axe routier», explique un ingénieur qui souligne le fait que «l’Etat n’était pas prêt».

En vérité, l’axe Aibd-Dakar est, dès lors, un véritable assommoir pour les autorités. Et le boulet s’érige imposant : l’autoroute à péage a tantôt souillé l’ouvrage avec son lot d’imperfections : manque d’éclairage, agressions etc. Dans le viseur, les détails d’un voyage loin d’être de confort pour les routards et résidents. En plus de la cherté des navettes évoquée dès les premières heures de l’inauguration, se pose un problème de trajet pour le moins périlleux.

Les uns évoquent l’absence de sécurité qui implique encore, à ce jour, ce besoin d’éclairage adapté, pendant que d’autres rapportent que «le flux du trafic sur l’axe Dakar-Sindia et Aibd a connu une augmentation des usagers» pour diverses raisons…Qu’importe, ils demandent, par ailleurs, une gestion efficiente pour anticiper sur les désagréments qui commencent à pointer le bout du nez. Au même moment, les spécialistes des réseaux routiers interpellent les autorités en charge de ce tronçon pour éviter qu’il ne soit le prolongement du long calvaire à Dakar.

koumpeu avec RAMATOU

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