Sénégal: Le discours en trompe – l’œil du président du Conseil Constitutionnel

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De par son attitude désinvolte lors de son discours d’investiture du président Macky Sall , le magistrat Pape Omar Sakho a surpris son monde et à su susciter l’étonnement et l’incrédulité de nos compatriotes qui ont pourtant cru même à tort jusqu’au bout malgré certaines réserves sur sa crédibilité ou à tout le moins sur sa disponibilité à dire le droit qu’il pouvait encore raviver de l’espoir en profitant de sa tribune pour décrire en toute objectivité toutes les failles voire tous les manquements qui ont jalonné le processus électoral et qui ont conduit de facto à une remise en cause de notre modèle consensuel d’arbitrage des questions électorales, mais aussi à pouvoir ouvrir un débat fécond sur une approche novatrice de nos institutions publiques et de l’Etat de droit. Mais non, il a outrepassé ses prérogatives et s’est livré à une analyse politicienne digne d’un véritable troubadour du roi de la cour de Benno Bokk Yakaar tout en distillant par ici et là quelques réflexions qui laissent penser aux moins avertis d’entre nous qu’il mesure à sa juste valeur la gravité de la situation. Mais non ! C’est juste un artéfact de langage en vue de détourner le curseur sur les vraies questions.
L’investiture de Macky Sall pour son second et dernier mandat présidentiel devrait servir au magistrat Pape Omar Sakho l’occasion inespérée de redorer le blason du Conseil Constitutionnel auprès de la société sénégalaise en raison même de la méfiance voire d’une suspicion généralisée de nos compatriotes sur la loyauté et le sens du devoir des sept membres du Conseil Constitutionnel. Une juridiction qui déclare toujours séance tenante son incompétence à se saisir de toutes les procédures déposées voire les questions soulevées par l’opposition pour demander l’arbitrage du Conseil Constitutionnel sur les projets de loi du président Macky Sall.
Une autre occasion ratée de se taire sur des sujets polémiques comme son adresse « votre épouse sans la sollicitude et l’action de laquelle, votre mission aurait risqué d’être assez complexe » à Madame Marieme Faye Sall en ce moment solennel durant lequel le juge Pape Omar Sakho s’écarte des principes de la République pour asseoir le temps de son discours la résurgence de la courtisanerie comme moteur de la société aristocratique. Rien ne justifie la conduite du juge Pape Omar Sakho. Ou est – ce une autre façon de rappeler à Madame Marieme Faye Sall qu’il tient à magnifier son engagement politique auprès de son époux le président Macky Sall pour sa « brillante » victoire qui ne souffre d’aucune anomalie et de contestation ? Des aveux graves et terribles du président du Conseil Constitutionnel Pape Omar Sakho.
Que dire de la sollicitude et de l’action de Mariéme Faye Sall qui visent ni plus ou moins qu’à acheter le soutien de beaucoup de nos compatriotes grâce à l’argent du contribuable sénégalais que sa Fondation Servir le Sénégal distribue à tour de bras aux militants et sympathisants voire aux plus vulnérables d’entre nous pour fausser le jeu démocratique. En effet, pendant et avant la campagne électorale, l’épouse du président Macky Sall a offert beaucoup d’argent à des personnalités religieuses pour obtenir leur soutien ou leur ralliement à la coalition Benno Bokk Yakaar .Comment est – ce encore possible qu’un haut magistrat magnifie et encourage cette forme de corruption et de détournement des services de l’action publique ?
A travers cet acte et d’autres encore sur ses attaques frontales contre l’opposition sénégalaise, la postérité retiendra du magistrat Pape Omar Sakho l’image d’un homme qui n’a que faire des charges de la fonction de président du Conseil Constitutionnel pour s’autoriser une sortie malencontreuse qui jette davantage le discrédit sur la magistrature sénégalaise. Pourtant, il pouvait royalement se passer de ce discours de courtisan et entrer définitivement dans le cœur de nos concitoyens qui ont une soif de justice et espèrent l’avènement même sur le tard d’hommes ou de de femmes engagés pleinement au service de la vérité et de la rectitude dans l’action publique nonobstant les obstacles et menaces de tous bords.
Que dire également à la suite du magistrat Pape Omar Sakho que « le scrutin n’a , du reste donné lieu à aucune contestation » pour affirmer de manière péremptoire qu’ « Il a été libre, sincère et transparent » et « qu’il n’a été révélé aucun fait ni aucune irrégularité de nature à altérer la crédibilité du scrutin » ? Non, monsieur Pape Omar Sakho. Les résultats de l’élection présidentielle du 24 Février 2019 ont été contestés par les quatre candidats et adversaires de Macky Sall. Ils ne reconnaissent pas du tout la véracité des résultats proclamés par le président de la Commission nationale de recensement des votes, le magistrat Demba Kandji et confirmés par les sept juges du Conseil Constitutionnel. Les quatre candidats de l’opposition ont tout bonnement refusé de porter leurs griefs et observations sur les irrégularités ou manquements préjudiciels du scrutin présidentiel voire de solliciter l’arbitrage du Conseil Constitutionnel parce qu’ils doutent depuis fort longtemps de la sincérité de ses membres à jouer pleinement leur rôle et à être à équidistance des chapelles politiques. Une audace qui se paie très chère.
Le magistrat Pape Omar Sakho ne pardonne pas à l’opposition le fait de n’avoir pas introduit de recours pour lui faciliter la tâche afin de mieux habiller le holdup électoral de la coalition Benno Bokk Yakaar d’où sa sortie au vitriol pour fustiger le comportement des adversaires politiques du président Macky Sall. Les attaques du magistrat Pape Omar Sakho donnent encore une fois de plus entièrement raison aux quatre candidats de n’avoir pas sollicité ses services. Ce discours de circonstances du président du Conseil Constitutionnel Pape Omar Sakho pour laver l’affront voire l’audace de l’opposition est juste un moyen pour ternir davantage l’image de la classe politique de l’opposition. Ce ton vengeur et moqueur serait absent de son discours si l’opposition avait félicité le candidat de la coalition Benno Bokk Yakaar. Mais, le magistrat Pape Omar Sakho tenait coûte que coûte à faire payer à l’opposition son crime même si cet écart de langage devrait ternir le caractère solennel de son discours.
Et malgré tout ce défoulement, le président du Conseil Constitutionnel Pape Omar Sakho ose encore reprocher à l’opposition sénégalaise son manque « d’inclinaison à la civilité républicaine ». Cependant, il feint d’oublier voire d’ignorer que cette inclination à la civilité républicaine ne tienne pas du tout la route à partir du moment où le rapport à la loi et aux institutions dont il tient à rappeler la nécessité de son respect par les acteurs politiques, est vicié et détourne de son objectif dès le départ par le président Macky Sall à l’entame de son premier mandat. Ce reproche est totalement infondé voire injuste et il défie l’intelligence et la clairvoyance de nos compatriotes. Ces remarques doivent être adressées au président Macky Sall. En vérité, il a passé tout son septennat à bafouer les principes les plus élémentaires de la République. Passez à autres choses monsieur Pape Omar Sakho. Ce discours est rayé et est à mille lieues de la réalité.
Par ailleurs, « ce moment d’introspection générale au plus profond de notre * moi * collectif, doit être mené avec courage et justice afin de mieux situer la responsabilité des uns et des autres sur lé recul démocratique de notre pays et sur la fiabilité voire sur la crédibilité de nos institutions républicaines. Il est certes très aisé comme vous le faites de décerner un satisfecit sans ambages à toutes nos institutions qui ont participé depuis le début au processus électoral et de lancer des attaques aux membres de l’opposition qui ne cessent de dénoncer les pratiques partisanes de l’administration aux antipodes de l’éthique républicaine.
Toutefois, il serait erroné de votre part de rejeter en bloc les accusations de l’opposition sénégalaise. Des membres influents de ces différentes administrations ont indiqué très clairement qu’ils s’activaient pleinement à la réélection du candidat nonobstant leur devoir de réserve et de retenue. L’administration a sciemment laissé le champ libre aux responsables de la coalition Benno Bokk Yakaar à torpiller le processus électoral voire même à leur apporter un soutien de taille dans les zones enclavées du pays pour faciliter le transfert d’électeurs. Certains membres du CENA ne parviennent pas à justifier le nombre impressionnant d’électeurs de certaines localités du pays.
Ne parlons même pas de l’Etat civil sénégalais qui a été défiguré voire utilisé à des fins politiciennes pour faciliter le holdup électoral de Macky Sall. La victoire du candidat Macky Sall à 58 % que vous magnifiez au passage a été obtenue et matérialisée par des procédés infâmes qui décrédibilisent nos institutions et qui jettent un regard trouble sur la cérémonie de prestation de serment du président Macky Sall. Investir un homme monsieur Macky Sall considéré par 42 % des électeurs sénégalais comme un président illégitime est une tâche indélébile qui restera à jamais gravée dans les anales du Conseil Constitutionnel et de l’histoire politique du Sénégal.
On comprend mieux maintenant la posture et la position indéfendable du magistrat Pape Omar Sakho au moment même où les thuriféraires les plus zélés de la mouvance présidentielle Benno Bokk Yakaar rasent les murs, veulent passer rapidement à autres choses afin de ne pas trop penser à leurs forfaitures ignobles et éprouvent une gêne manifeste pour fêter une victoire obtenue grâce à du faux. Et lui, du haut de son siège de magistrat nous distrait sur des sujets qui n’ont de réalité que dans sa conscience d’homme qui refuse de porter le flambeau de la lucidité dans l’action comme le faisait naguère feu le magistrat Kéba Mbaye. Autres temps, autres mœurs.
Au plus, il réserve ses félicitations aux électeurs sénégalais tout en gardant un silence coupable et irresponsable sur la démarche éminemment sage des quatre candidats de l’opposition de ne pas manifester ouvertement dans nos rues leur colère et de créer de facto les conditions d’un soulèvement populaire pour permettre aux forces du désordre de Macky Sall de réprimer les manifestants. Cette paix sociale n’a été possible que grâce à la maturité des quatre candidats de l’opposition. Les électeurs déçus et révoltés de la tournure grotesque de l’élection présidentielle du 24 Février 2019 n’attendaient que l’appel à l’insurrection des leaders de l’opposition pour descendre dans la rue et exiger du président sortant le respect de la volonté populaire. Pas de liesse populaire du camp du candidat proclamé vainqueur par les juges du Conseil Constitutionnel, mais plutôt comme si un moment de deuil, de gêne et de tristesse s’était abattu sur le pays de la Teranga. Une victoire mieux un holdup dans le déshonneur.
C’est pourquoi, il est extrêmement difficile d’envisager aujourd’hui au Sénégal véritablement une culture de l’Etat de droit à partir du moment où ceux et celles qui sont chargés par la loi de veiller à l’application de la loi sur toute l’étendue du territoire, sont les premiers à bafouer voire à violer la règle de droit. C’est pour cette raison encore que nous croirons pas à la prestation de serment du président Macky Sall du 2 Avril 2019. Ce n’est que du pipeau pour défendre encore la République alors que rien qui ressemble à l’idée même de la République n’est en vigueur au Sénégal. Nous avons encore certes des institutions, mais elles ne reflètent plus ni n’incarnent les nobles valeurs de la République.
Ce pays est devenu exsangue et vous avez raison de souligner que le président Macky Sall prête serment dans un contexte national et des clivages de tous ordres se font jour. Mais, il faut aller loin et de ne pas se contenter seulement de soulever cette question qui à terme risque de saper l’unité nationale. Il faut oser dire la vérité et de pointer du doigt la responsabilité du président Macky Sall sur l’effritement de notre cohésion sociale. Pendant sept ans, il a posé les germes d’une fracture sociale inédite au Sénégal et déclenché une suspicion de tension ethnique entre les différentes communautés linguistiques du pays afin de mieux asseoir sa domination. Vous observez l’omerta sur ce sujet. Pourtant, vous devriez être le premier à tirer la sonnante d’alarme afin de préserver le pays de tensions dont il a su toujours se préserver depuis toujours et cultiver le raffermissement des liens sociaux par la justice et le droit. En effet, il est illusoire de penser voire d’espérer une paix sociale avec un régime ou un État qui pratique de fait l’injustice comme mode opératoire de gestion des affaires de la Cité.
Il n’y a pas d’acquis démocratiques qui tiennent dans nos pays sous développés où très souvent ne règne que la loi du plus fort, celle du pouvoir en place. D’où la nécessité de porter à la tête de nos institutions des hommes et des femmes d’une probité exemplaire et d’une compétence jamais remise en défaut afin d’indiquer et d’impulser la voie du changement. A défaut, ce pays s’enlisera toujours dans la voie de la médiocrité, du larbinisme et de l’irresponsabilité.

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